
La Russie vit toujours dans un monde parallèle et, malheureusement, seul l’échec militaire dans la guerre qu’elle mène contre l’Ukraine, sera en mesure de faire revenir les Russes à la réalité, dont ils ont perdu le sens, il y a plus de 90 ans de cela. La Russie mène une guerre hybride à laquelle l’Occident n’est pas du tout prêt.
Par Edmond Huet le 6 mai 2015
La Russie mène une guerre hybride à laquelle l’Occident n’est pas prêt.
Tous les feux sont au rouge. Toutes les données de toutes les sources, croisées, indiquent que la Russie a concentré ses troupes sur toute direction d’attaque possible, à commencer par Koursk et Kharkiv, et par Rostov au nord-est de l’Ukraine et en terminant par la Crimée et les territoires côtiers.
D’après les évaluations, la quantité de formations militaires russes s’élève de 65 000 à 95 000 hommes.
En plus de ces troupes, on évalue la quantité du matériel militaire que la Russie a fourni aux séparatistes du Donbass à
- 700 unités de chars de combat (de plus en plus de T-72 V3, utilisés uniquement par les forces armées russes ) qui font leur apparition,
- ainsi que 1 100 véhicules d’infanterie, comme les véhicules de transport de troupes (les BTR et les BMP) avec un nombre croissant de BTR-82.
Les photos faites à l’aide des drones par des structures bénévoles, prises de l’autre côté de la frontière avec la Russie, montrent des kilomètres de systèmes de lance-roquettes multiples BM-21 GRAD alignés, prêts à être actionnés pour tirer une grande quantité de fusées, lors d’intenses tirs d’artillerie contre les positions de l’armée ukrainienne.
En ce moment, la Russie fournit à ses pantins qui sévissent conjointement avec les 40 unités militaires de l’armée régulière russe, dans le Donbass, les dernières nouveautés produites par son complexe d’industrie militaire. Cherchez les preuves de la présence militaire russe qui fleurissent à profusion sur les sources d’origine ouverte et sur les réseaux sociaux, comme VK, ce Facebook russe, où les photos des « exploits » sont très nombreuses et exposées comme des trophées, incluant la géolocalisation des auteurs.
Les soldats tués aux combats étaient en possession de nombreux signes permettant d’identifier leur appartenance aux diverses unités militaires des forces armées russes et leur nationalité russe (passeports, certificats…).
L’Union des comités des mères des soldats à recueilli des milliers de noms de soldats russes tués sur le territoire ukrainien.
De nombreux fragments d’obus tirés de GRAD, de mines anti-chars qui n’ont pas explosées, ainsi que des obus trouvés suite aux tirs du mortier et de l’artillerie, indiquent, par leur marquage, que l’origine de ces armements et munitions est la Russie. Les séries de ces munitions datent de 2009. Lors des combats, des caisses ayant contenu des munitions de tir et des mines anti-chars ont été trouvées. Ces objets portent les étiquettes qui indiquent leur dernier lieu de stockage, sur le territoire des camps militaires de l’armée russe.
Il est temps pour les leaders des pays européens d’oublier la ligne de conduite « politiquement correcte » et de considérer la menace. Chaque jour qui passe rend le prix de ce conflit de plus en plus élevé pour toute l’Europe.
S’opposer à Vladimir Poutine est le seul moyen d’arrêter la guerre, avant qu’elle n’éclate partout en Europe.
L’Ukraine ne mendie pas, l’Ukraine se bat !
Au cours de la dernière année, l’armée composée de 6 000 hommes sans moyens ni organisation, incapable de résister en cas d’attaque massive, s’est transformée en force capable de s’interposer, de livrer bataille contre les sois-disant « séparatistes » du Donbass, en juin et juillet 2014, ce qui a obligé Moscou à envoyer ouvertement ses meilleures unités en renfort, au mois d’août de la même année.
Au quotidien, en absence de la loi martiale, les bénévoles et les activistes concevaient les armes de combat pour aider l’armée à résister aux envahisseurs russes. Les officiers russes, eux mêmes étaient contraints de reconnaître avoir sous-estimé la capacité des ukrainiens de protéger leur Patrie.
Plusieurs entreprises se sont mises à produire tout le nécessaire pour les soldats ukrainiens, les bénévoles réparaient le matériel, les structures privées procuraient du carburant, les sympathisants du monde entier faisaient des dons d’argent ou des moyens médicaux et autres.
Et pourtant, à deux reprises, l’Ukraine s’est retrouvée victime de l’idéologie basée sur l’idée que l’absence d’armes mènerait à la paix.
L’Ukraine a renoncé à son arsenal nucléaire, troisième à l’échelle mondiale, contre les garanties de sécurité, prévues par le mémorandum de Budapest de 1994. L’un des signataires s’est avéré être son agresseur et les autres ont choisi de rester spectateurs du conflit, ne voulant pas s’opposer à la Russie et à ses ambitions impérialistes.
La Russie n’a jamais respecté les accords signés à Minsk et elle n’en a pas l’intention.
Alors, armons l’Ukraine maintenant, avant qu’il ne soit trop tard !
Cet article a été publié par Kyiv Post le 29 avril 2015.
Edmond Huet, ingénieur à la retraite, spécialiste de l’export d’armements, a souvent collaboré avec les médias suisses et français. Il a aidé à identifier les unités et les armes utilisés contre les protestataires pendant la révolution du Maïdan, et, ensuite, les unités russes en Crimée. Il réside à Kyiv.
Traduction de Viktoria Mait.
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