Le 19 octobre 2016, le Président du Conseil des États a prévu de recevoir à Berne la présidente du Conseil de la Fédération de Russie, son homologue.
Cette rencontre ne devrait pas avoir lieu dans la mesure où, ces dernières années, les autorités de la Fédération de Russie ont été responsables des forfaits suivants :
- annexion de la Crimée en violation du droit international ;
- fourniture du missile qui a abattu le vol MH17, causant la mort de 298 personnes;
- envoi de forces armées en Ukraine ;
- provocation d’actes de guerre dans l’est de ce pays, dont le bilan se monte à 10 000 morts et à 1,8 million de déplacés ;
- promulgation de lois portant atteinte aux libertés fondamentales ;
- incitation, directe ou indirecte, à l’assassinat de plusieurs journalistes et opposants politiques ;
- appui militaire au régime de Damas ;
- bombardements de convois humanitaires et d’hôpitaux en Syrie.
Pour ses actions criminelles, la Fédération de Russie a notamment :
- été condamnée par l’Assemblée générale de l’ONU suite à l’annexion de la Crimée ;
- été accusée devant le Conseil de Sécurité de barbarie et de crimes de guerre en Syrie ;
- fait l’objet de sanctions internationales, notamment de la part de l’Union Européenne, des Etats-Unis, du Canada et de l’Australie.
La Suisse a veillé jusqu’ ici à ce qu’elle ne puisse être utilisée pour contourner les sanctions internationales adoptées suite à l’annexion de la Crimée. Parmi les personnes sanctionnées et répertoriées par la Suisse figure Valentina Matviyenko, présidente de la Chambre haute du parlement russe et soutien sans faille de la politique de Vladimir Poutine. Pourtant, en dépit des sanctions qui la frappent, le Président du Conseil des États a l’intention de la recevoir, ce 19 octobre, à Berne.
Au prétexte que la situation en Ukraine se serait améliorée, cette visite semble aujourd’hui acceptable aux yeux de certains. Mais en réalité, dans l’Est de l’Ukraine, la situation est loin d’être apaisée ; les accords de Minsk ne sont pas respectés, et les armes lourdes tuent chaque semaine des soldats et des civils. De plus, la Russie se livre à une guerre totale en Syrie, anéantissant notamment la ville d’Alep, dont les habitants de tous âges meurent sous les bombes, y compris non conventionnelles. En 2014, le Conseil National avait annulé l’invitation faite au président de la Douma ; pourtant, depuis lors, la politique du Kremlin ne s’est pas infléchie dans le bon sens.
Si, dans de telles circonstances, le Président du Conseil des États recevait l’émissaire très officiel de la Fédération de Russie, il commettrait une faute politique. Nulle bonne raison ne peut légitimer aujourd’hui l’accueil de la représentante d’un État qui piétine les droits fondamentaux, viole les frontières d’un pays voisin et commet des crimes de guerre. Les vrais amis de la Russie ne sont pas ceux qui souhaitent cette visite ; la Suisse a plus et mieux à apporter à ce grand pays.
Le Conseil des États a l’occasion de délivrer un message fort, sauvegardant ainsi son honneur et celui de la Suisse : nous l’appelons pour cela à reporter cette visite.
Pour l’ACRU : Philippe Gafner